La vie, comme elle va

"S'il suffisait de lire comme dans une bulle de cristal, alors, ce serait, facile.Mais il faut vite déchanter, prendre la route, sac au dos et marcher, toujours marcher pour oublier ce que l'on a déjà fait, ce que l'on va faire. Il faut attendre que la nature nous prenne et nous ouvre sa voie. C'est une progression incessante, pour de si petites choses".
Roger Dautais . Septembre 2009

Un voyage étonnant au cœur du land Art

mercredi 14 novembre 2012

To Rick Forrestal :La mémoire amnésique


Pour Isabella Kramer : La naissance sur l'estran
Pour Camino Roque  : Le rouge st  mis deux fois

Pour Romain Dautais: Le dialogue des pierres
La traversée
Etre là
To Ruma : Signe d'amitié à  l'Orient
A Guy Allix :Survivre au vent et à la solitude
Carpe Diem
Derniers feux
To Katelen : La répétition
A Raymond : Vel' d'hiv 1942


à Marie-Claude...
à Vincent et Stéphanie, nos enfants.


J'arpente les couloirs vides de ma mémoire amnésique. Depuis quelques jours, le ciel est bas, gris,  plombé comme une promesse d'hiver. Il faut aimer ce temps  pour se mettre dehors. Cela tombe bien, j'aime ce temps. Il resserre les idées. Pas de grandes chaleurs, de couleurs  à profusion, de ciel  bleu si photogénique,où  l'on se perd,  le gris apaise les lisières, appelle la pluie, filtre les bruits. Je roule en direction de la mer. Ces jours derniers, j'ai exploré toutes les possibilités que me donnaient les allées d'un parc bordées par la rivière aux canards. Mon idée était de réaliser  un serpent d'eau à l'aide de feuilles d'érables épinglées entre elles  par  leur pétiole. J'ai  un  peu laissé passer l'automne qui  me saoule avec ses couleurs et  l'heure venue,  j'ai eu du mal  à ramasser de grandes feuilles d'érables. Elles me sont nécessaires  pour ce travail, mais, déjà tombées depuis 15 jours, avant les plus petites et je peine  à y trouver mon compte. 
Le serpent est modeste, 5 mètres pas  plus.Je le mets  à l'eau . La rivière se rebelle. Son courant ramène irrésistiblement ce serpent, vers la rive  où il s'entortille avec les branches. Je le repousse,  il prend du large puis s'enroule sur  lui-même et  se  termine en  un signe que je qualifierai d'oriental. Aussitôt, je pense  à Ruma et fait une photo  pour lui.
 Aujourd'hui, je longe le canal de Caen  à la Mer et, arrivé au pied du phare de Ouistreham, j'oblique vers la droite, direction  la Pointe du Siège. Un grand parking  stoppe l'avancée de tous véhicules. l'été, il est   noir de monde. Aujourd'hui est pratiquement vide. Trois voitures de pêcheurs et la mienne. C'est tout. Le vent m'est favorable puisqu'il  chasse les bruits de la ville.
 Je quitte l'endroit,  franchis  la digue et me retrouve de plain pied dans l'estuaire de  l'Orne. Immensité d'herbus, dont le silence naturel en impose, parfois déchiré  par le  cris d'oiseaux de mer. Devant  mes  yeux,  à 300  mètres, le cours de l'Orne s'étalant  au fur et à mesure de son approche vers la mer. Les berges en cet endroit représentent  un  glacis de vase grise,  luisant et tendu comme  une peau. Il faut bien connaître  pour s'y aventurer. On peut, s'enliser, glisser dans le fleuve, et alors... J'y ai  fait quelques écritures, et je pense  tout naturellement  à cette phrase de Youenn Gwernig : 
" Car il faut que chacun compose  le poème de sa vie".
 Écriture réalisée avec le fer de ma canne de marche, directement sur le glacis et offerte au fleuve dans la plus parfaite des solitudes. 
Aujourd’hui, je reste près de la digue et je contemple avec peine,  combien le lieu est pollué. Loin des yeux  loin du cœur. La grande plage aux touristes est nettoyée, dépolluée, peignée chaque matin de la saison,  mais ici, c'est le dépotoir, le grand  oubli.
 Il faut avoir beaucoup d'imagination  pour travailler  ici. C'est la règle du jeu, autrement, je resterai dans  mon  jardin, ferai mes installations,mes photos. Personne n'y verrai rien. Rassurez-vous, je n'ai  pas de jardin et  la nature m'attire irrésistiblement, quelque soit le temps.
 Je me lance donc dans une première installation,  un carré de bois flottés que je vais  ponctuer par des bais de cotonéaster ramenées d'une cueillette des précédents jours. Je reprends la marche,direction  la mer. De gros troncs d'arbres charriés par le fleuve, se sont échoués,  portes par les grandes marées, dans les herbus,  posés comme des petites baleines inertes. Je choisis de composer sur un de ces troncs et reprends la route. La digue s'est trouvée entamée par les grandes marées. Je remarque ces brèches  par  où saigne la mer, sur ces terres volées au pied desquelles, gisent quelques pierres qui ne tarderont  pas  à  être emportées par les flots.
Je m'aperçois que si, ma mémoire scande mes pas, elle nourrit aussi  mes réflexes. Je suis  un passeur de sens et il me faut inventer de signes"in situ" pour que ma vie se déroule comme  il faut. J'élève  un cairn sur cette brèche et le dialogue s'instaure entre le maritime et le végétal. L'arbre répond  à la pierre comme le  poème aux simples mots. A peine ai-je le temps d'apprécier ce cairn que je passe de l’autre côté de la digue, sur les terres asséchées.
 Une petite  pluie fine m’accompagne depuis  une heure, froide et déterminée. Je suis en Bretagne, je rêve  à d'autres rives, la Rance, brumeuse en automne, grise de  crachin où j'avance  jusqu'à la goélette  blanche, Fanny me tiens par la main. Elle a six ans.
-  Dis-Papa, tu crois qu'on  va la voir ta goélette, avec la pluie?
Trente ans  ont passé. Je ne sais pas si la goélette blanche est toujours amarrée sur la rive gauche de la Rance, mais je sais que la  pluie  me fait toujours  rêver.


Roger Dautais




JE RETIENS LE CHEMIN

Je retiens le chemin
de rencontre et d'énigme,
la nuit et le parcours
des terres labourées
dont l'attente et  la paix
sous la houle des neiges

Cet hiver qu'on traverse
où l'eau se fait murmure
pour donner au chemin 
de la femme amoureuse,


Bernard JAKOBIAK



DÉNUEMENT

Je ne sais plus qu'un poème
Qui ne sais rien de moi
Qui ne sait rien que terre
Et les vers dans la plaie  ultime
Ce visage sans nom d'un nom dérisoire
Et le désir  porté par la blancheur blessée
Les cheveux épars et le sang aux tempes

La fuite fatiguée
L'insensée dérobade des mots

Guy ALLIX

Solitudes    ROUGERIE

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Landartiste, photographe, auteur de livres pour enfants, Roger Dautais est aussi un artiste atypique, sensible et attachant.Il a sû, dans la diversité de ses expressions, trouver une harmonie par la pratique quotidienne de cet art éphémère : le Land Art. Il dit "y puiser forces et ressources qui lui permettent, également, depuis de nombreuses années, d'intervenir auprès de personnes en grande difficulté ( Centre de détention pour longues peines et personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer) pour les aider par la médiation de l'art.