La vie, comme elle va

"S'il suffisait de lire comme dans une bulle de cristal, alors, ce serait, facile.Mais il faut vite déchanter, prendre la route, sac au dos et marcher, toujours marcher pour oublier ce que l'on a déjà fait, ce que l'on va faire. Il faut attendre que la nature nous prenne et nous ouvre sa voie. C'est une progression incessante, pour de si petites choses".
Roger Dautais . Septembre 2009

Un voyage étonnant au cœur du land Art

jeudi 12 décembre 2013

Le serment de Penhouët :  à Marie-Claude
L'élan en baie de Saint Jean :  pour Thibault Germain
D'un  monde  à  l'autre :  pour Camino roque
Paroles de fougères : Pour Marie-Josée-Christien

Le chant des lavandières de Gouyanzeur : Pour Guy Allix

La traversée rouge : pour Chris

Le témoin bleu de Kermadio : pour Dritange

Le cri de Cadoudal: pour Tilia

Spiralede Saint-Cado I : pour Joelma

Spirale de Saint - Cado à marée haute : To  the sea

Ode au couchant de Mériadec :  à Tesa Medina

Mémoire de Ria d'Auray : Pour Nathalie Beaumes
Mandala song : pour Uuna

Les  orgues silencieuses : pour Anne des Ocreries

L'adieu au Soleil : Pour Alain Jégou et Claude Pelieu




Pour Marty, avec  mon amitié.


Un  jour en Bretagne

Pas trop envie de  quitter l'île de Saint Cado, mais, si je veux  être  à  l'heure, au rendez-vous du soleil couchant et de la marée,  il faut partir maintenant.Le froid est vif. Je n'est croisé âme qui vive  à cette heure dans les rochers qui donnent dans la Ria d'Etel. Il est 16 heures et le soleil commence  à descendre. Nous sommes presque en hiver. Je n'ai parlé  à personne et la solitude de cet instant  me va. La vie est étrangement belle par moments. La nature  m'absorbe et je m'absente du  monde. Parfois  le réveil est brutal. Je me demande ce que je fais  là. Le sens  plein de mes actions ne m'apparaît pas dans  l'immédiat. Il me faut conjuguer, assemblages, ressenti, associations de couleurs,de  formes, émotions, exaltation, teintés de doute. Et si c'était la dernière fois ? Je boucle une année de plus et dans 8 jours exactement,  j'aurai 71 ans. Nul ne sait quel avenir  m'est destiné, mais j'ai  la belle intention de ne rien changer dans mon  mode de vie : pratiquer le land art, au jour le jour. Continuer  à publier des  poètes, ici, car leur parole nourrit mes rêves de liberté.
Je rejoins la plage du bourg de Saint-Cado qui fait face  à  l'Île du même nom. Il est temps de me mettre  à  l'ouvrage. Je commence le tracer d'une spirale dans ce  lieu de la Ria d'Etel dont les lumières sont surprenantes de beauté. A quelques mètres du bord, une barque de  pêcheur,  à l'ancre, se fait promener sur 180° par la marée  montante.On dirait qu'elle dans en  m'accompagnant. Ma solitude est parfois  interrompue par des compliments que  m'adressent des marcheurs, du haut de la digue " Eh ! Celle  là, elle n'est pas  née de la main de  l'homme ! Je pense " non ! Je travaille comme  un  pied". Mais répondre me déconcentrerai et il  me reste peu de temps, alors, je les salue de ma casquette. Ainsi, je trouve le temps de terminer dans les derniers rayons du couchant puis la mer reprend ses droits et dévore ma spirale. J'aime son appétit  !

Rive Droite : 
Au croisement des mondes des Vivants, des  morts et des esprits

Je cherche  à atteindre et découvrir la Baie de Saint Jean, depuis qu'une de mes lectrices me l'a recommandée. Mais voilà, malgré la carte d'état-major, ce n'ai  pas facile car je me laisse souvent distraire et je prends facilement les chemins de traverse comme ce jour  là. Je me dirige vers la rivière de Crac'h et je traverses quelques villages : Coët an Hour, Kerhivan, Kergroix, me laissant guider par la beauté des lieux. Rien  n'est grave dans ces petits voyages qui me perdent  puisque, je cherche cela.
Et  puis je tombe sur un endroit magique, très habité par l'eau. Un triangle de  routes, planté de chênes centenaires avec  au  milieu un lavoir envahi par les herbes et d'une attirance incroyable. Me voici  bien au croisement des  mondes des vivants, des morts et des esprits. Les cris des lavandières, leurs rires, ont convoqué les fougères pour qu'elles témoignent au lavoir de Gouyanzeur, de la vivacité des eaux dormantes et s’assemblent en triskel. Ici, les mémoires sont de chair et de sang et c'est par une ribambelle de gouttelettes rouges qu'elles rejoindront les chênes centenaires, au-dessus de cressons.Sur la route de Penhouët j'ai entendu le galop d'une cavale blanche, sans la voir. Aux chênes centenaires, témoins  muets, j'ai demandé de garder  le serment de Penhouët matérialisé par deux cœurs transpercés d'une  ligne rouge. Ici le geste  ponctue la vision et l'installe sur  un banc battu par les vents et la  pluie. Je reste sous le charme de cet endroit.
Je reviendrai au petit matin gelé, lorsque la brume recouvrira l'étang du silence qui  jouxte le lavoir et lui apporte  l'eau. Je lui confierai quelques  poésies secrètes d'Allix, de Grall, de Gwernig afin d’apaiser ces forces qui stoppent ma  progression  vers la Ria.

Rive Gauche

La Baie de Saint Jean
Quelques jours  plus tard, je décide d'attaquer  mes recherches par la rive gauche de la rivière de Crac'h. Bien sûr, j'aurai pu me faire emmener bêtement sur les lieux par  un autochtone mais où serait le  jeu et le plaisir ? En fait, après quelques errances de  plus, je constate que la clé de la découverte  passe par  le dolmen de Luffang, dont je vous ai parlé la dernière fois. Après, c'est facile  : marcher  plein Est  puis tourner première route  à gauche, vers Kerhihuel, Lann er Marr, rejoindre Kerjean à  l'Ouest, marcher  sur Kerougan et tourner  à droite au premier croisement. Après  un  kilomètre de marche,la Baie de Saint Jean, dans toute sa majesté.
Le sol est gelé, ce matin,  l'herbe craque sous mes pieds. L'air est vif et les cris des  oiseaux de  mer, transpercent l'espace. L'esprit des lieux est  immense. Il faut se faire tout petit, attendre, regarder, comprendre. Je marche au bord de  l'eau et rencontre bientôt,  une minuscule plage de sable fin.. Je pose  mon sac à dos et je m'agenouille pour contempler les rayons de soleil qui s'emparent de la ria. Instants rares  où  l'esprit se repose entièrement, bercé par le spectacle d'une nature apaisée. On  pourrait dire que le silence se fait  prière, si je savais  prier. Deux  installations naîtront de ces instants. La première parle de la vie, de la mort, autour d'une pomme de  pin   et des magnétismes échangés au  moment  où tout bascule.
La seconde sera réalisée  un peu plus tard pour artiste finlandaise, Uuna, très inspirée  par les mandalas et que j'aime beaucoup.
Je reviendrai le lendemain en fin d'après-midi, capter d'autres ondes, d'autres messages et lever un cairn avec la naïveté d'un enfant qui veut chanter la beauté du monde et rendre  hommage au coucher du soleil.


Roger Dautais



SANS COMMENTAIRE

Sans l'amère à boire eau  
fabulée sans embâcles sans
infernaux paluds ni lisières
pissées de sang sanglots
divinement mélancomiques
glauque noire plissée rouge
tout juste débâtée
incomestible et pourtant nourricière
fuite fuite cambuse des bourlingues
boutique sans retour à la bricole
voici qu'elle déboule et rempêtre l'amas méga
tonnant des galets polypoly morphes-et-chromes
ombre pour solde de tout compte
avalante incertaine

                            sans
écaillues sirènes aux mouillages forains
sans Noë Crusoë les mains dans l'achillée
mille-feuilles la roquette jaune la rose pimprenelle
sans part catégoriquement maudite
ou pas sans charge de la preuve   délivrance
désaveux palingénésies   sans fondu
tourneboulé l'or à l'aube et dans l'est
sans l'oiseau phénix la digitale pourpre
les corneilles grandes petites moyennes
l'aigrette dépeignée

beurré salé le ciel excessi
vement feuilleté foutoir
rectangulaire et décalco
maniaque à la fenêtre
large pièce de boeuf cru rouge/bleu
fourbi d'acide azur si peu que
si pourtant pas grand
chose et ni
                 fait ni à faire

sans espoir ou ni quoi
ni qu'est-ce son envers enfer  mais
non sans la petiote espérance l'enfant merveillée
qui criait dans les embruns ar mor! ar mor!

(On disait que là-bas les vents
désensés sans frontières gueulaient
noir couraient brassaient
la fumante écumante houle)

sans tambour ni trompette
bastingages ballasts bastringue à métaphores
sans trimètres amphibrachiques
ouèbe ou gougueule

sans lingerie armoire à confitures
rempailleuses ni matelassières à l'ancienne
sans les rues ni les bois profonds et noirs
sans le verbe être et tout ou
rien déluges majuscules rabines ou sauts de loup
sans les pluies sur la table rouge dans un parc à lilas
et ce pavillon un peu trop campagne et sans où
aller   belles verdures
         roses et pommiers
        
deuil pour deuil
sans lettre morte (ou vive)
l'Ource l'Armance la Lanterne et l'Ognon
le rouge-queue d'avant 8h
ni le papillon jaune citron les loopings
et les grands planés dans les vents norrois
des trissantes les hirondelles

sans la belle ombre
passagère rêveuse celle
qui dit: si mes souvenirs sont exacts
ce nuage je l'ai déjà vu il y a 107 ans
dans un grenier c'était
dans un faubourg  
                           qui dira: in my end
is my beginning et vice-versa

sans à qui parler pour de vrai
définitivement sans mots
mots mots cochonnerie
sans moi sans
                      MOI

et la vie c'était inouiement
douce ou pas douce ces jours
à bises draches et calicots noirs
et rouges    ces jours
                                à t'aimer
littéralement et dans tous les sens
dis    le fut-ce?

8 septembre 2013


Henri DROGUET 

Pour mieux connaître Henri Droguet  :

http://poezibao.typepad.com/poezibao/2012/01/henri-droguet-anthologie-permanente.html

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Landartiste, photographe, auteur de livres pour enfants, Roger Dautais est aussi un artiste atypique, sensible et attachant.Il a sû, dans la diversité de ses expressions, trouver une harmonie par la pratique quotidienne de cet art éphémère : le Land Art. Il dit "y puiser forces et ressources qui lui permettent, également, depuis de nombreuses années, d'intervenir auprès de personnes en grande difficulté ( Centre de détention pour longues peines et personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer) pour les aider par la médiation de l'art.