La vie, comme elle va

"S'il suffisait de lire comme dans une bulle de cristal, alors, ce serait, facile.Mais il faut vite déchanter, prendre la route, sac au dos et marcher, toujours marcher pour oublier ce que l'on a déjà fait, ce que l'on va faire. Il faut attendre que la nature nous prenne et nous ouvre sa voie. C'est une progression incessante, pour de si petites choses".
Roger Dautais . Septembre 2009

Un voyage étonnant au cœur du land Art

mardi 20 mai 2014

Terre d'espoir  : aux rescapés de Lampedusa
Les  guetteurs de Ty bihan  :  pour Norma
Ty bihan song : pour Gwenola Gwernig
Tout  à gauche : pour Martine Grunenwald
La cabane du  pêcheur  : pour Anne Lemaître
Éloge de la lenteur  : pour Denise Scaramai

Toul Chignaned : Pour Serge Mathurin Thébault
L’apparente sérénité d'un lieu sanglant  : Pour Ana Minguez Corella
Rotation  : Pour Isabelle Jacoby
Boîte  à mémoires :  pour Guy Allix
La diagonale orange  : Pour Christian Cottard
Le rêve éveillé : Pour Chrystelle Martinez
Le guetteur de marée en ria :  Pour Véronique Brill
La porte du Sud  : Pour Claude Pélieu et Alain Jégou


à Marie-Claude.


Passer entre le visible et  l'invisible 
et trouver dans cet espace indéfini, la liberté de créer...

Je n'ai relevé ni  les routes et chemins,  ni  les  heures sombres, ni celles  où la flamme ne brillait  plus, ni les jours  ou je ne suis pas sorti  pour en arriver  là et dire, malgré tout : je continue. Mes les voici réunies  pour vous, les choses inutiles comme  on  me dit si souvent et qui me tiennent en vie. Lorsque  mon  pays fait le  plein de touristes, alors commence  pour moi, la saison de  l'évitement et je me sens  un peu obligé d'aller voir ailleurs, si je peux me protéger du brouhaha,  trouver un peu de tranquillité, non pas que je déteste parler, mais si je ne fais que  ça, ce qui  m’arrive parfois, le travail n'avance pas.
 Trop de beau temps me tue. Je préfère l'alternance, avec des journées  plus rugueuses,  plus venteuses qui dégagent les côtes  font sortir les voileux qui animent  l'océan. N'étant pas dans une  forme  physique excellente , j'ai réduit mes sorties consacrées aux cairns qui demandent quand  même  un  peu de force. Je me souviens de cette  journée  passée  à Carnac, justement par  vent bien établi, annoncé  à 30 nœuds où je me suis bien amusé avec  lui.
Élever  un cairn dans ces conditions est assez sportif, voire drôle, car ce vent ne se gène nullement  pour le basculer  au  moment le  moins attendu et  pour en rapporter 4  ou 5 en  photo, qui ne soit  pas trop  mal,  il faut en élever quatre fois plus, ce qui  malgré tout, reste fatiguant. D'autant plus que par un tel vent,  il faut choisir des  pierres très lourdes  pour établir la base,  monter l'ensemble, en gardant un certain  poids et terminer pas trop haut , par du plus léger. Un cairn d'un  mètre cinquante qui s'écroule, ça peut faire très mal si bien que je  le regarde toujours avec respect, lui parle et le remercie de tenir en équilibre, quand cela se fait. Qui ne connait pas ce dialogue, qui  n'a jamais entendu le chant des  pierres, ni vu leur respiration par grand vent, ne connait  rien ! 
Je ne parlerai  pas de  poésie de  l'instant  pour ne pas faire bondir les experts ! ah ! les experts ! Si  on ne les avait pas. Personnellement je ne les écoute ni ne les consulte. Alors qu'ils définissent le lieu sacré de la poésie, c'est leur affaire, pas la mienne. Et  puis, avec  l'impression de comprendre  pour vous,  ils arriveraient  à vous faire creuser  votre  propre tombe,  pour gagner du temps et de  l'espace vital,  pour eux, les élites !
J'ai ainsi cherché sur cette côte Bretonne située entre  l'Île de Stuhan et Porh Saint Guénhaël, situés  à l'Est et  à l'Ouest de Carnac, de quoi composer le  poème de ma vie, comme  le disait si bien le grand Youenn Gwernig, avec les  pierres les  plus belles, les  plus vivantes, les  plus  à même de raconter, témoigner,
parler du  monde  comme  il va. Et  là je pense  à cette installation de la série Exil, appelée Terre d'espoir dédiée aux rescapés de Lampedusa, dont bien peu de journalistes parlent quand  il faudrait dénoncer ce scandale tous les jours.
Je me suis réfugié dans les ria, suivant le jusant, écoutant le chant de la  mer s'accorder  à celui des  oiseaux. J'ai découvert des cabanes de  pêcheurs, abandonnées et lieux de  mémoire d'un  travail ouvrier disparu avec la crise.J'ai aimé travailler dans leurs traces Sous les chênes, les tapis d'akènes qui saignaient la vie par  milliers, ont donné naissance à des arbrisseaux, nés dans l'écarlate  pour tenter l'aventure de la vie.J'éprouve  une certaine tendresse  pour ces jeunes arbres, tandis que dans  mon corps, bat  un tambour du  monde, déjà usé, incarnation d'une vie offerte par mes parents, il  y a si  longtemps. Vous savez,les instants  où jaillissent mes  morts dans mes pensées,  pour s'incarner dans un souffle de  vent,  un chant de  merle  ou de grive, pour l'avoir déjà évoqué ici , me paraissent sympathiques et je les sens, fréquentables, aimants. Ils m'accompagnent un bout de chemin avant que je n'aille les rejoindre.
Passer entre le visible et  l'invisible et trouver dans cet espace indéfini, la liberté de créer, c'est trouver le fil conducteur qui  mène aux petits  bonheurs.
Les sources de Kernours, de Brec'h,  les rives du loc'h, le Champ des martyres ont accueilli cette retraite forcée des plages et vous avez ici le résultat de  mon  travail en terre de solitude.
On me demanda  un  jour si les titres donnés  à mes installations, avaient un sens. Oui, bien sûr et je le fais en pensant à ceux  auxquels je les dédie mais aussi au  lieu,  à  l'instant de leur fabrication, cela ne fait qu'un tout.
Je vous remercie de votre fidélité au Chemin des Grands Jardins dont le  rythme de  parution a un peu diminué. Sachez que je suis toujours heureux de vous  lire et  que je réponds  à chacun.

Roger DAUTAIS




Exil

il reste à se souvenir du chemin
il reste à retrouver le passage
il reste à s’attacher de ces temps d’ici, calmes
quitte à perdre sa voix

mais je reste, échappée

un voile s’est déchiré depuis longtemps, il pend, calme
et me laisse en suspens
le désir de départ évanoui
englué de brouillard
reste une vibration sourde et ces temps d’ici, calmes
il ne fait pas vraiment nuit
c’est-à-dire pas vraiment
il fait semblant de jour
c’est-à-dire je me perds
c’est-à-dire ne pas dire
quitte à perdre la voix
il reste que je reste
avec un visage sans bouche
sans pourtant reconnaître le tranquille du temps
car il ne se peut pas
car il ne se peut plus, sans bouche
voix décentrée
sans…

sang

jusqu’au vide


Brigitte Mouchel
" évènements du  paysage " 

 Éditions Isabelle Sauvage 2010

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Landartiste, photographe, auteur de livres pour enfants, Roger Dautais est aussi un artiste atypique, sensible et attachant.Il a sû, dans la diversité de ses expressions, trouver une harmonie par la pratique quotidienne de cet art éphémère : le Land Art. Il dit "y puiser forces et ressources qui lui permettent, également, depuis de nombreuses années, d'intervenir auprès de personnes en grande difficulté ( Centre de détention pour longues peines et personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer) pour les aider par la médiation de l'art.